Pour une politique publique de la donnée

Source de l'image : data.gov.fr

En décembre 2020, un député français du nom d’Éric Bothorel remettait à son Premier ministre un rapport sur la Politique publique de la donnée, des algorithmes et des codes sources.

Il s’agit d’une somme de 216 pages, rien de moins ! Mais elle est quand même dotée d’une synthèse. Et dès le commencement, le ton se veut incisif et direct :  

« Le partage de données entre administrations de l’État est scandaleusement faible, au point que
certaines directions ressaisissent des données disponibles dans une direction du même ministère. »

« La sécurité ne doit pas masquer une mauvaise foi. Certains acteurs publics prennent prétexte de dispositions de sécurité, qu’ils interprètent dans leur seul intérêt, pour ne pas ouvrir. » 

Extrait du rapport sur la Politique de la donnée, des algorithmes et des codes sources (2020)

Pourtant, la crise sanitaire nous l’a bien démontré : l’ouverture et l’utilisation des données des organismes publics (de la santé comme d’autres domaines) sont indispensables à l’efficacité de l’action publique, au suivi de l’action gouvernementale et au débat démocratique. 

C’est ainsi que suite au dépôt du rapport Bothorel, le premier ministre français de l’époque, Jean Castex, a fait paraître une circulaire relative à la politique de la donnée, des algorithmes et des codes sources. La circulaire se positionne d’emblée en faveur d’une politique ambitieuse et engagée en faveur de l’ouverture des données des administrations et leur adresse plusieurs recommandations. 

Le message aux administrations en matière de données ouvertes

La circulaire sur la Politique de la donnée met de l’avant des priorités centrales pour une administration voulant se positionner en faveur de la circulation de la donnée, des algorithmes et des codes, dans des formats ouverts et exploitables par divers utilisateurs. Voici quelques-unes de ces priorités : 

  • Nommer un administrateur des données, chargé d’élaborer la stratégie de l’administration, de coordonner les parties prenantes et d’être le point de contact des utilisateurs des données ;
  • Mobiliser les dispositifs techniques disponibles pour une ouverture responsable des données sensibles à travers, notamment, l’accès sécurisé aux données, la pseudonymisation, l’anonymisation ou l’agrégation ;
  • Animer des écosystèmes de réutilisateurs des données et des codes sources dans l’administration et au-delà, afin d’identifier les jeux de données à forte valeur ajoutée, de définir d’éventuels standards et d’alimenter le partage ;
  • Inclure dans les contrats avec les fournisseurs de services des clauses relatives à l’ouverture, à la circulation et partage des données, des algorithmes et des codes sources ;
  • S’assurer que les données ouvertes de l’administration sont référencées sur les portails nationaux tels que data.gouv.fr, la plateforme ouverte des données publiques françaises. 

Mobiliser les données d'intérêt général détenues par tous

Les données utiles à une politique publique ne sont pas toutes produites par des acteurs étatiques. Une grande partie d’entre elles est colligée par des acteurs privés, qu’ils fournissent ou non des services aux organismes publics.

Pensons par exemple aux données de géolocalisation collectées par des entreprises comme Google et qui permettaient pendant la pandémie de mesurer si la population respectait ou non les mesures de confinement. Comment inciter les fiduciaires de ces données à les partager avec les pouvoirs publics et les citoyens ? Une politique publique de la donnée devrait s’atteler à cette tâche ardue.

Dans sa Charte des données, la ville de Nantes, en France, a défini le concept de « données d’intérêt métropolitain ». Ce sont des données détenues par les acteurs privés qui « sont susceptibles de revêtir un caractère d’intérêt général dans la mesure où elles peuvent contribuer utilement à la connaissance des dynamiques du territoire et à la mise en œuvre des politiques publiques ». 

Pour autant, malgré l’existence d’une définition, des incitatifs efficaces doivent encore être mis en place pour favoriser le partage de données détenues par les organismes privés et qui sont d’un intérêt central pour les administrations et ministères.

Plusieurs villes travaillent aujourd’hui à l’établissement de modèle propices au partage de données et qui puissent remporter la confiance des partenaires publics et privés. Tout ces modèles peuvent être explorés dans le premier Cahier de l’Observatoire Data Publica auquel nous avions déjà dédié une publication. Une lecture passionnante !

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